Faible afflux de capitaux, perspectives incertaines pour l’ETF, inflation en hausse après l’upgrade de Dencun, les « tueurs d’Ethereum » qui lui soufflent dans le cou… Ethereum pourra-t-il décoller dans ce cycle comme il l’a fait dans les précédents?
Jusqu’à présent, ce marché haussier a été un one-coin show, le bitcoin menant l’ensemble du marché crypto. Cela n’a rien d’inhabituel, mais si l’on se fie au passé, l’éther devrait à un moment donné se faire remarquer non seulement en répétant, mais aussi en amplifiant les mouvements de prix du bitcoin.
Cependant, la deuxième cryptomonnaie en termes de capitalisation boursière a été plutôt décevante dans ce cycle de marché. Alors que le BTC a gagné 342 % depuis le creux de janvier 2023 (avec une correction de -16 %), l’ETH n’a gagné que 250 % et a corrigé de -27 % depuis. Fait remarquable, au cours de cette période, le bitcoin a atteint un nouveau sommet historique, tandis que le sommet de l’ether, 4 090 $, est toujours inférieur aux 4 875 $ qu’il a atteints en 2021.
Une telle sous-performance soulève des questions sur le potentiel de l’Ethereum et sur les forces actuelles du marché. Regardons l’état de l’Ethereum de plus près.
L’une des principales raisons de la sous-performance de l’Ethereum est liée à l’afflux de capitaux.
Alors que le bitcoin a bénéficié d’un afflux important de nouveaux capitaux, grâce à l’approbation des spot ETF aux États-Unis, l’ether n’a pas bénéficié d’un tel catalyseur.
Le récent rapport de Glassnode montre que si la capitalisation réalisée par les détenteurs à court terme du bitcoin est presque au même niveau que le dernier pic haussier, celle de l’ethereum a à peine décollé de ses niveaux les plus bas. Cet indicateur, qui mesure la richesse en USD détenue dans les coins déplacées au cours des six derniers mois, suggère un afflux nettement faible de nouveaux capitaux vers l’éther.
Cependant, les schémas de détention à long terme des investisseurs en Ethereum suggèrent une croyance inébranlable en sa valeur. Les HODLers HODL, en particulier les pièces âgées de 1 à 3 ans. Cela suggère que les investisseurs chevronnés en ETH attendent patiemment des prix plus élevés… et une éventuelle approbation de l’ETF Ethereum.
Après que la SEC (U.S. Securities and Exchange Commission) a approuvé les ETF spot Bitcoin, l’attention du secteur s’est portée sur la prochaine frontière réglementaire – les ETF spot Ethereum.
Les entreprises qui attendent actuellement la réponse de la SEC à ce sujet sont BlackRock, Fidelity, VanEck, Invesco, Galaxy, Hashdex, Ark Invest, 21 Shares et Grayscale. Cependant, les chances que leurs demandes soient approuvées sont plutôt faibles, surtout si l’on considère la fameuse affirmation du président de la SEC, Gary Gensler, selon laquelle toutes les cryptomonnaies autres que le bitcoin sont des securities.
Signe de la morosité du marché, les actions ETHE (Ethereum closed fund) de Grayscale se sont récemment négociées avec une forte décote, comprise entre 21 % et 26 % depuis le mois de mars (source : Ycharts).
La première décision de la SEC sur l’Ether spot ETF est attendue pour le 23 mai, date à laquelle la commission devra se prononcer sur la demande de VanEck.
Ethereum est depuis longtemps affecté par des frais de transaction (trop) élevés. Pour y remédier, sa feuille de route prévoit une transformation à terme en un système « sharded », où les données des transactions et leur traitement sont séparés, ce qui permetterait d’augmenter le débit des transactions et de réduire les frais.
Le mois dernier, la blockchain a implémenté la mise à jour dite Dencun contenant un « proto-danksharding » – une étape vers un danksharding complet qui permettrait aux solutions de layer-2 sur Ethereum de stocker des données de transaction volumineuses hors chaîne. La mise à jour a installé des algorithmes de réduction des frais pour les layer-2, ce qui a permis de réduire les frais de réseau. Ainsi, les frais de transaction médians sont aujourd’hui presque quatre fois moins élevés qu’avant la mise à jour, pour un même niveau d’activité sur le réseau.
Cette amélioration globale plutôt positive a eu une conséquence inattendue : une inflation plus élevée. En 2022, la Merge a introduit un mécanisme de brûlage de frais, où une activité de réseau plus élevée signifiait des frais brûlés plus élevés et donc une inflation de l’ETH plus faible. En fait, depuis la Merge, l’éther est même devenu déflationniste, brûlant 1,6 million d’ETH contre l’émission de 1,2 million d’ETH (source: utrasound.money)
Cette tendance est en train de changer. Ce graphique de CryptoQuant montre comment le montant total des frais brûlés s’est découplé de l’activité du réseau. La nouvelle offre d’ETH augmente maintenant au rythme quotidien le plus rapide depuis la fusion, alors que les frais brûlés ont chuté à la suite de la mise à jour Dencun.
L’inflation croissante fait disparaître la notion de « ultrasound money » et rend l’éther moins rare, ce qui a également un impact sur son prix.
La concurrence croissante dans le domaine du web3 a également un impact sur Ethereum. Avec des frais toujours élevés et un débit de transaction toujours faible, les « tueurs d’Ethereum » continuent de gagner du terrain, ce qui montre que le concept de web3 est toujours d’actualité.
Solana est désormais le concurrent le plus dangereux, attirant de nombreux projets web3 qui ont besoin d’une grande scalabilité. Avec 71 millions de transactions quotidiennes (non-votes), il bat Ethereum (1 million de transactions quotidiennes) haut la main. De plus, l’activité sur la chaîne augmentant rapidement, le scepticisme quant à la viabilité du modèle de Solana, où les frais sont peu élevés, commence à se dissiper. En effet, le total des frais de gaz quotidiens de Solana augmente régulièrement et pourrait même bientôt concurrencer celui d’Ethereum (source: Nansen).
Néanmoins, Ethereum reste le leader du DeFi (finance décentralisée), avec 104 milliards de dollars de valeur totale bloquée (TVL), soit 66 % de toutes les TVL. Binance Smart Chain (5,7 %) et Solana (5,5 %) continuent de développer leurs propres écosystèmes DeFi, mais ils sont encore beaucoup plus petits que celui d’Ethereum.
Dans l’ensemble, la position d’Ethereum est visiblement plus faible que lors des précédents cycles haussiers. La blockchain doit accélérer ses propres améliorations en matière de scalabilité sans trop compter sur les couches 2. Jusqu’à présent, les premiers tests de la technologie danksharding, qui augmenterait le débit des transactions d’Ethereum, sont prévus pour janvier 2024. Toutefois, il est probable qu’ils soient retardés, comme l’ont été presque toutes les autres mises à jour d’Ethereum. Dans cette attente, l’éther pourrait continuer à suivre la tendance haussière générale du marché des cryptomonnaies, mais avec une amplitude moindre.